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Décret n° 64-231 portant règlement d’administration publique pour l’application de la loi n° 62-1292, relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel.

Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre,

Vu la Constitution et notamment ses articles 6 et 7 ;

Vu les dispositions organiques de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962, relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, et notamment son article 3-V, aux termes duquel « un règlement d’administration publique fixe les modalités d’application des présentes dispositions organiques ;

il détermine notamment le montant du cautionnement exigé des candidats et les conditions de la participation de l’Etat aux dépenses de propagande » ;

Le Conseil d’Etat entendu ; Après avis du conseil des ministres ,

DECRETE

Art. 1er. — Tous les nationaux français, inscrits sur une des listes électorales de la métropole, des départements ou des territoires d’outre-mer, participent à l’élection du Président de la République.

TITRE PREMIER

Déclarations et candidatures.

Art. 2. — Les présentations des candidats à l’élection du Président de la République sont adressées au Conseil constitutionnel à partir de la publication du décret convoquant les électeurs et doivent parvenir au plus tard à minuit le 19° jour précédant le premier tour de scrutin.

Toutefois,, dans les départements et territoires d’outre-mer, elles peuvent être déposées dans le même délai auprès des préfets et des chefs de territoire ;

dans ce cas, les préfets et chefs de territoire en assurent aussitôt la notification au Conseil constitutionnel par voie télégraphique, après en avoir délivré récépissé.

Art. 3. — Les présentations sont rédigées sur papier libre et obligatoirement revêtues de la signature de leurs auteurs.

Elles doivent comporter, qu’elles soient faites à titre individuel ou collectif, outre les nom, prénoms et qualité du candidat proposé, l’indication des nom, prénoms, date et lieu de naissance, profession et domicile du ou des signataires suivie de la désignation précise de la fonction ouvrant droit à présentation.

Sur demande du Conseil constitutionnel, les préfets des départements de la métropole et d’outre-mer et les chefs des territoires d’outre-mer peuvent être appelés à vérifier l’authenticité des signatures et mentions visées au présent article. Art. 4. — Les citoyens mentionnés au deuxième alinéa de l’article 3-1 de la loi susvisée du 6 novembre 1962 ne peuvent faire de présentation que pour un seul candidat.

En aucun cas, les présentations ne peuvent faire l’objet d’un retrait après leur envoi ou leur dépôt.

Art. 5. — Chaque candidat doit verser entre les mains du trésorier-payeur général du lieu de son domicile, agissant en qualité de préposé de la caisse des dépôts et consignations, un cautionnement de 10.000 F, avant l’expiration du 17e jour précédant le premier tour de scrutin.

Le trésorier-payeur général avise immédiatement le Conseil constitutionnel du versement effectué.

Art. 6. — Le Conseil constitutionnel, après s’être assuré de la régularité des candidatures et du consentement des candidats, en arrête la liste. La publication de cette liste au Journal officiel doit intervenir au plus tard le 16e jour précédant le premier tour de scrutin.

Notification en est adressée, par voie télégraphique, aux préfets, aux chefs de territoire et aux chefs de postes diplomatiques et consulaires.

Art. 7. — Le droit de réclamation contre l’établissement de la liste des candidats est ouvert à toute personne ayant fait l’objet de présentation.

Les réclamations doivent parvenir au Conseil constitutionnel avant l’expiration du jour suivant celui de la publication au Journal officiel de la liste des candidats. Le Conseil constitutionnel statue sans délai.

Art. 8. — Lorsque la majorité absolue des suffrages exprimés n’est pas obtenue au premier tour de scrutin, les retraits éventuels sont portés à la connaissance du Conseil constitutionnel par les candidats, au plus tard à minuit le jeudi suivant le premier tour.

Le Gouvernement est informé par le Conseil constitutionnel des noms des deux seuls candidats habilités à se présenter au second tour ;

la publication en est immédiatement faite au Journal officiel.

Notification en est en outre adressée, par voie télégraphique, aux préfets, aux chefs de territoires d’outremer et aux chefs de postes diplomatiques et consulaires.

TITRE II

Campagne électorale.

Art. 9. — La campagne en vue de l’élection du Président de la République est ouverte à compter du jour de la publication au Journal officiel de la liste des candidats.

Elle prend fin le vendredi précédant le scrutin à minuit.

S’il y a lieu de procéder à un deuxième tour de scrutin la campagne s’ouvre à compter du jour de la publication au Journal officiel des noms des deux candidats habilités à se présenter.

Elle prend fin le vendredi précédant le scrutin à minuit.

Art. 10. — Conformément aux dispositions organiques de l’article 3-IV de la loi du 6 novembre 1962, tous les candidats bénéficient de la part de l’Etat des mêmes facilités pour la campagne en vue de l’élection présidentielle.

Une commission nationale de contrôle de la campagne électorale veille au respect desdites dispositions.

Elle exerce les attributions -prévues aux articles suivants. Elle intervient, le cas échéant, auprès des autorités compétentes pour que soient prises toutes mesures susceptibles d’assurer l’égalité entre les candidats et l’observation des règles édictées au présent titre. Cette commission comprend cinq membres :

— le vice-président du Conseil d’Etat, président ;

— le premier président de la Cour de cassation ;

— le premier président de la Cour des comptes ;

— deux membres en activité ou honoraires du Conseil d’Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes désignés par les trois membres de droit.

Les membres de droit sont, en cas d’empêchement, remplacés par ceux qui les suppléent normalement dans leur corps ;

les deux autres membres de la commission sont, le cas échéant, remplacés par des suppléants désignés dans les mêmes conditions qu’eux.

La commission peut s’adjoindre des rapporteurs pris parmi les membres du Conseil d’Etat, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes.

Elle est assistée de quatre fonctionnaires :

— un représentant du ministre chargé des départements et territoires d’outre-mer ;

— un représentant du ministre de l’intérieur ;

— un représentant du ministre des postes et télécommunications ;

— un représentant du ministre chargé de l’information.

La commission nationale de contrôle est installée au plus tard 48 heures avant le jour de l’ouverture de la campagne électorale.

Art. 11. — La tenue des réunions publiques et la campagne par voie de presse sont régies par les dispositions des articles 61 et 62 du code électoral.

Art. 12. — Pendant la durée de la campagne électorale, le principe d’égalité entre les candidats doit être respecté dans les programmes d’information de la radiodiffusion-télévision française en ce qui concerne la reproduction ou les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne.

Chaque candidat dispose sur les antennes de la radiodiffusiontélévision française au premier tour de scrutin de deux heures d’émission télévisée et de deux heures d’émission radiodiffusée.

Compte tenu du nombre de candidats, la durée de ces émissions pourra être réduite par décision dé la commission prévue à l’article 10 du présent décret.

Cette décision devra être prise dans les vingt-quatre heures de la publication au Journal officiel de la liste des candidats.

Les heures d’émission sont utilisées personnellement par les candidats.

Toutefois chaque candidat peut demander que les partis ou groupements politiques dont l’action s’étend à la généralité du territoire national et désignés par lui participent à ses émissions, après y avoir été habilités par la commission nationale de contrôle qui vérifiera que ces partis ou groupements répondent aux exigences prévues au présent alinéa.

Le ministre chargé de l’information fixe le nombre, la durée et les horaires des émissions.

L’aménagement de chaque tranche d’émission est fixé par la commission prévue à l’article 10 de telle sorte que soit assurée l’égalité d’audience de chaque candidat.

L’ordre d’attribution des temps de parole est déterminé par voie de tirage au sort effectué par ladite commission. Chacun des deux candidats, au second tour de scrutin, dispose dans les mêmes conditions de deux heures d’émission radiodiffusée et de deux heures d’émission télévisée sur les antennes de la radiodiffusion-télévision française.

Art. 13. — Des emplacements spéciaux sont réservés aux affiches électorales de chaque candidat dans les conditions prévues aux articles 66 et 67 du code électoral.

Les panneaux d’affichage sont attribués dans l’ordre de la liste des candidats établie par le Conseil constitutionnel.

Art. 14. — Chaque candidat ne peut faire apposer, durant la campagne électorale précédant chaque tour de scrutin, sur les emplacements déterminés à l’article 13, qu’une affiche énonçant ses déclarations et une autre annonçant la tenue de ses réunions électorales et, s’il le désire, l’heure des émissions qui lui sont réservées sur les antennes de la radiodiffusion-télévision française.

Ces affiches doivent répondre aux conditions fixées par l’article 2 du décret n° 64-66 du 25 janvier 1964.

Le texte de l’affiche énonçant les déclarations doit être uniforme pour l’ensemble du territoire de la République.

Il doit être déposé auprès de la commission nationale de contrôle de la campagne électorale, au plus tard à 20 heures, le deuxième dimanche précédant le premier tour de scrutin, et le deuxième samedi précédant le second tour. La commission nationale de contrôle transmet aussitôt ce texte aux préfets et chefs de territoire.

Les affiches sont imprimées par les soins du candidat ou de ses représentants.

Après vérification de leur conformité par le préfet ou le chef de territoire, leur affichage est assuré par les commissions locales prévues à l’article 16.

Les affiches annonçant la tenue des réunions sont imprimées et affichées par les soins du candidar ou de ses représentants.

Art. 15. — Chaque candidat ne peut faire envoyer aux électeurs, avant chaque tour de scrutin, qu’un texte de ses déclarations sur feuillet double, répondant aux normes fixées par l’article 4 du décret n° 64-66 du 25 janvier 1964.

Ce texte doit être uniformé pour l’ensemble du territoire de la République.

Il doit être déposé auprès de la commission nationale de contrôle de la campagne électorale dans les délais prévus à l’alinéa 2 de l’article 14 pour le dépôt du texte des affiches.

La commission nationale de contrôle le transmet aussitôt aux préfets et chefs de territoire.

Le texte des déclarations est imprimé par les soins du candidat ou de ses représentants.

Après vérification de sa conformité par le préfet ou le chef de territoire l’envoi aux électeurs en est assuré par les commissions locales prévues à l’article 16.

Art. 16. — Dans chaque département ou territoire est instituée une commission locale de contrôle, placée sous l’autorité de la commission nationale de contrôle de la campagne électorale.

La composition, les attributions et le fonctionnement de ces commissions sont réglés par les dispositions des articles 7 à 10 du décret n° 64-66 du 25 janvier 1964.

La commission locale fait procéder, sur les emplacements définis à l’article 13 et dans l’ordre prévu audit article, à l’apposition des affiches énonçant les déclarations des candidats.

La commission nationale peut charger le président de la commission locale de toute mission d’investigation sur les questions relevant des attributions de la commission nationale.

Art. 17. — Sont pris directement en charge par l’Etat :

— le coût du papier, l’impression et la mise en place des bulletins de vote et des textes des déclarations visés à l’article 15 ;

— le coût du papier, l’impression et les frais d’apposition des affiches visées à l’article 14 ;

— les dépenses provenant des opérations effectuées par les commissions instituées par les articles 10 et 16 ainsi que celles résultant de leur fonctionnement.

Art. 18. — Les tarifs d’impression et d’affichage sont déterminés par arrêté du préfet ou du chef de territoire suivant les règles fixées par l’article 14 du décret n° 64-66 du 25 janvier 1964. Art. 19.

— Outre les facilités accordées en vertu des dispositions du présent titre, l’Etat contribue aux frais de campagne électorale exposés par les candidats.

Une somme de 100.000 F est remboursée, à titre forfaitaire, à chaque candidat ayant obtenu au moins 5 p. 100 des suffrages exprimés.

TITRE III

Opérations électorales.

Art. 20. — Les heures d’ouverture et de clôture du scrutin sont fixées par le décret de convocation des électeurs. Sans préjudice des dispositions de l’article 3-II de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962, les opérations électorales sont organisées selon les règles fixées par le décret n° 64-45 du 18 janvier 1964, en ce qui concerne la composition et le fonctionnement des bureaux de vote, la désignation et les prérogatives des délégués des candidats habilités à contrôler les opérations électorales et l’établissement des procès-verbaux dans chaque commune ou circonscription administrative.

Un exemplaire des procès-verbaux est transmis au préfet ou chef de territoire soit par porteur, soit sous pli recommandé, en franchise, pour être remis à la commission de recensement visée à l’article 23 ci-après.

Art. 21. — Les bulletins de vote, d’un modèle uniforme pour tous les candidats et ne comportant que leurs nom et prénom, sont imprimés et mis à la disposition des commissions départementales de contrôle par les soins de l’administration. Art. 22. — N’entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement :

— les bulletins imprimés différents de ceux qui sont fournis par l’administration ;

— les bulletins établis au nom d’un candidat ne figurant pas sur la liste officielle arrêtée par le Conseil constitutionnel et publiée au Journal officiel avant chaque tour de scrutin en application des articles 6 et 8 du présent décret.

Art. 23. — Dans chaque département ou territoire une commission de recensement, siégeant au chef-lieu, totalise dès la clôture du scrutin et au fur et à mesure de l’arrivée des procès-verbaux, les résultats des communes ou des circonscriptions administratives Cette commission comprend un magistrat désigné par le premier président de la cour d’appel, président, et deux juges désignés par la même autorité.

Art. 24. — Un représentant de chacun des candidats peut assister aux opérations de la commission et demander, éventuellement, l’inscription au procès-verbal de ses réclamations.

Art. 25. — Le président de la commission doit se tenir en liaison avec le délégué que le Conseil constitutionnel a pu désigner pour suivre sur place le déroulement des opérations électorales, en application de l’article 3-III de la loi nu 62-1292 du 6 novembre 1962.

Il fournit toutes informations et communique tous documents que ledit délégué juge utiles pour l’accomplissement de sa mission.

Art. 26. — La commission tranche les questions que peut poser, en dehors de toute réclamation, le décompte des bulletins, et procède aux rectifications nécessaires, sans préjudice toutefois du pouvoir d’appréciation du Conseil constitutionnel.

Pour chaque département ou territoire le recensement des votes doit être achevé au plus tard le lundi qui suit le scrutin à minuit.

Les résultats sont consignés dans des procès-verbaux établis en double exemplaire et signés de tous les membres de la commission.

Le premier exemplaire est transmis sans délai, sous pli chargé en franchise, au Conseil constitutionnel ;

y sont joints avec leurs annexes les procès-verbaux des opérations de vote dans les communes ou circonscriptions administratives qui portent mention de réclamations présentées par les électeurs.

Le deuxième exemplaire est déposé aux archives départementales ou à celles du territoire.

Art. 27. — Le recensement général des votes est effectué sous la surveillance du Conseil constitutionnel, à son siège.

Il en est dressé procès-verbal. Si, au premier tour, la majorité absolue n’est pas atteinte, le Conseil constitutionnel fait connaître dès que possible et au plus tard le mardi à 20 heures, le nombre des suffrages obtenus par chacun des candidats en présence.

Le Conseil constitutionnel proclame les résultats de l’ensemble de l’élection dans les dix jours qui suivent le scrutin où la majorité absolue des suffrages exprimés a été atteinte par un des candidats.

TITRE IV

Contentieux et dispositions diverses.

Art. 28. — Tout électeur a le droit de contester la régularité des opérations en faisant porter au procès-verbal des opérations de vote mention de sa réclamation.

Le préfet ou le chef de territoire, dans un délai de quarante-huit heures suivant la clôture du scrutin, défère directement au Conseil constitutionnel, au besoin par voie télégraphique,

-les opérations d’une circonscription de vote dans laquelle les conditions et formes légales ou réglementaires n’ont pas été observées.

Tout candidat peut également, dans le même délai de quarante-huit heures, déférer directement au Conseil constitutionnel, au besoin par voie télégraphique, l’ensemble des opérations électorales.

Art. 29. — Des décrets pris sur le rapport du ministre chargé des départements et territoires d’outre-mer, fixeront les modalités d’application et, en tant que de besoin, d’adaptation des dispositions du présent décret dans ces départements et territoires. 

Art. 30. — Le Premier ministre, le ministre d’Etat chargé des départements et territoires d’outre-mer, le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre des affaires étrangères, le ministre de l’intérieur, le ministre des armées, le ministre des finances et des affaires économiques, le ministre des postes et télécommunications et le ministre de l’information sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

C. DE GAULLE.

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

GEORGES POMPIDOU.

Le ministre d’Etat

chargé des départements

et territoires d’outre-mer,

LOUIS JACQUINOT.

Le garde des sceaux,

ministre de la justice,

JEAN FOYER.

Le ministre des affaires étrangères,

MAURICE COUVE DE MURVILLE.

Le ministre de l’intérieur, ROGER FREY.

Le ministre des armées, PIERRE MESSMER.

Le ministre des finances et des affaires économiques,

VALÉRY GISCARD D’ESTAING.

Le ministre des postes et télécommunications, JACQUES MARETTE.

Le ministre de l’information, ALAIN PEYREFITTE.