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Circulaire n° 10-217-1914 relative aux conditions du fonctionnement du séquestre des maisons allemandes autrichiennes et hongroises.

Bordeaux, le 3 Novembre 1914.

Le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice à MM. les Premiers Présidents des Cours d’Appel et Procureurs Généraux près les dites Cours.

Par ma circulaire du 13 Oclobre dernier, j’ai invité MM. les Procureurs Généraux à provoquer la mise sous séquestre

de toutes marchandises, de tous biens et genéralement de toutes valeurs mobilières et immobilières dépendant des maisons

allemandes, autrichiennes et hongroises pratiquant ou avant pratiqué le commerce, l’industrie ou l’agriculture en France.

Les réquisitions qu’ont à prendre les parquets en cette malière sont destinées a assurer l’exécution du décret du 27 Septembre dernier qui, dans le second paragraphe de son article ter, a formulé contre les sujets d’Atlemagne et d’Autriche-Hourgrie, interdiction en France de “tout commerce” en employant celte expression dans son acception la plus large.

Il est interdit aux maisons allemandes ou austro-hongroises de continuer leurs opérations de quelque flacon et sous quelque forme que ce soit, directement, où indirectement, sous le nom de leurs chefs ou propriétaires ou, au moven de personnes

interposées, ouvertement où secrétement mandatées à cet effet.

En énonçant cette prohibition, le décret du 23 Septembre ne la pas créées il n’a fait qu’en constater Fexistence, l’état

de guerre avant nécessairement et de plein droit entrainé lPineapacité de commercer en France pour les Allemands, Autrichiens et Hongrois. Aussi ce décret a-til fait rejimonter au 4 Août pour les sujets d’Allemagne et au 18 du même mois pour ceux d’Autriche-Hongrie l’effet de la défense qu’il a édictée.

En définitive, depuis les 4 et 15 Août, est interdite ;a continuation de toute entreprise ou exploitation commerciale, industrielle ou agricole par, ou pour, des maisons allemandes, autrichiennes ou hongroises.

Aussi, dès que j’eus appris que par jugements de tribunaux de commerce Intervenus avant le décret susvisé des maisons

allemandes ou austro-hongroises avaient été, à la demande de leurs créanciers ou de leurs employés ou ouvriers, pourvus

d’administrateurs chargés d’en assurer provisoisement la gestion pendant la durée des hostilités au mieux des intérêts de tous et par conséquent au profit des chefs ou propriétaires des dites maisons, ai-je donné des instructions pour faire rapporter d’urgence ces jugements et pour empécher qu’à lavenir, il en soit rendu de semblables.

Il m’a paru, au surplus, que l’initiative des mesures judiciaires à prendre comme conséquence des dispositions du décret du

27 Septembre ne doit par être abandonnée aux intérêts privés qui ne sont pas seuls en cause. C’est l’intérêt général qui, après avoir inspiré ce décret, doit commander les mesures propres à en procurer l’application; c’est en son nom et par l’organe de ses représentants, les magistrats du Ministère Public, qu’il convient qu’elles soient requises.

Le Ministère Publhe na pas sa place dans l’organisation des tribunaux de commerce: 11 nexiste que devant les tribunaux civils C’est done aux Présidents des Tribunaux civils que les Parquets ont été invités, par ma circulaire du 135 Octobre,

à présenter requête aux fins de mise sous sequestre de l’actif des maisons allemandes, autrichiennes où hongroises.

La mission de s séquestres ainsi nommés, à la différence de celle qui avait été confiée à quelques Administraieurs par des

tribunaux de commerce, n’est pas d’assurer aux lieu et place des chefs ou propriétaires empéchés, la marche des atlures des maisons placées sous la main de Justice.

En principe elle à un caractère purement conservatoire et, si ces séquestres sont qualifiés pour accomplir des actes ae gestion, c’est uniquement à l’effet de recevoir les sommes dependant de lacul dont ils ont la garde, et d’acquiller le passif correspondant ;ils ne sauraient, et reule genérale, aller au delà, et normalement la mise sous 6 juestre à pour conséquence de faire cesser les opérations de la maison

à laquelle elle s’applique.

Mais si la survie pure et simple d’une maison allemande ou austro-hongroise est incompatible avec l’existence du sequestre, sa fermeture immédiale et totale serait, en

certains cas, de nalüre à compromettre plus où moins gravement des inierêts français, dignes de sollicitude et la sauvegarde de ces intérêts peut exiger, au Moins

a titre temporaire et dans des limites à déterminer, la continuation de l’entreprise ou de l’exploitation Commerciale, Industrielle ou agricole.

C’est ainsi que, par, ma circulaire du 21 Octobre, j’ai admis que la mise sous sequestre ne fait pas obstacle à ce que les

ciublhissements allemands où austro-hongrois, dont les produits sont utilisés pour les besoins de nos armées, soient maintenus en aclivité en vue de subvenir aux nécessités de la défense nationale et d’accord avec l’autorité militaire où maritime, soit que celle-ci continue L’exploitation en gestion directe ou qu’elle procède par voie de réquisition.

Mais les intérêts de la défense nationale ne sont pas les seuls qui puissent justifier une certaine prolongation des operations

des maisons placées sous séquestre.

Il peut y avoir lieu, selon les circonstances, de recourir à la mème mesure pour préserver les interèts de la maind’œuvre française ou des créanciers français.

Mon attention a été également attirée sur le cas où une maison allemande, autrichienne ou hongroise fabriquerait des

produits indispensables à Findustrie francaise, qui serait hors d’état, dans les circonstances actuelles, de se les procurer

ailleurs. La continuation de lexploitation apparaissant alors Comme commandée par l’intérêt national ne saurait soulever d’objections dans la mesure, du moins, où elle est susceptible de servir cet intérêt.

Dans ces diverses hypothèses l’application du séquestre doit se concilier avec le souci des intérêts français auxquels

sans certains ménagements où tempéraments, on risque de préjudicier. Mais, si en pareil cas la prolongation du tonelionnement de maisons allemandes,autrichiennes ou hongroises peut être admise, c’est à la condition que, tout à la fois, quant à sa durée et quant à la nature des opérations à poursuivre, elle soit maintenue dans des limites strictement déterminces.

Au surplus, eile ne saurait dependre de la simple appréciation des séquestres et elle doit être subordonnée à une autorisation expresse donnée par les Présidents des Tribunaux civils, sur réquisitions des parquets qui auront soin, avant de formuler leurs propositions, de s’entourer de tous avis uliles. Les ordonnances en vertu desquelles les Presidents accorderont cette autorisation, en fixeront les conditions dune façon précise.

Si le fonctionnement d’unétablissementallemand, autrichien où hongrois, est prolongé au dela de sa mise sous la main de justice, le choix de FAdministrateur sequestre doit porter sur une personne ayant des connaissances professionnelles neécessaires pour gérer la maison dans des circonstances satisfaisantes, ou si le séquestre désigné est un Administrateur judiciaire de carrière où un agent des domaines, l’adjonction d’un collaborateur technique s’impose.

La surveillance, qu’il incombe aux Présidents des Tribunaux civils et aux

Parquets d’exercer sur les Administrateurs séquestres, devra se faire particulierement étroite lorsque ceux-ci auront à assurer, dans certaines limites, le maintien en activité de maisons allemandes, où austrohongroises, et elle devra tendre nottamment à empêcher que, dans la continuation des opérations de ces maisons, les Administrateurs séquestres dépassent les bornes qui leur ont été assigrées,

compte sur. voire Ne. igilance pour tenir la main à l’observations des presentes

instructions, que je me réserve, S’il y a lieu, de préciser et de compléter.

Aristide BRIAND.