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Convention n° 2-191-1912 pour la protection des œuvres littéraires et artistiques.

Le Président de la République Française, Sur la proposition du Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, du Ministre de l’Intérieur, du Ministre de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts et du Ministre des Colonies,

Le Sénat et la Chambre des députés ayant approuvé la Convention signée à Paris, le 14 avril 1912, entre la France et la Russie, pour la protection des œuvres littéraires et artistiques et les ratifications de cel acte ayant été échangées à Paris, le 13 mai 1912, ladite Convention, dont la teneur suit, recevra sa pleine et entière exécution:

Le Président de la République Française et S. M. l’Empereur de toutes les Russies également animés du désir de protéger les sciences, les lettres et les arts, ont résolr d’adopter, d’un commun accord, les mesures les plus propres à assurer réciproquement dans les deux pays, aux auteurs, la protec.

tion de leurs droits sur leurs œuvres litté.

raires ou artistiques et ont, à cet effet, désigné pour leurs plénipotentiaires :

 

Le Président de la République Française, S.. Exc. M. de Selves, sénateur, ministre des Affaires Etrangères,

 

 

et S. M, l’Empereur de toutes les Russies, et S. Exec, M. Iswolskv, son ambassadeur extraordinaire et. plénipotentiaire, près le Président de la République Française, Lesquels, dûment autorisés. ont arrêté les dispositions suivantes :

 

Art. 1er, — Les ressortissants de chacune des deux hautes parlies contractantes jouissent, dans chacun des deux pays, pour leurs œuvres littéraires ou artistiques, qu’il s’agisse d’œuvres publiées dans l’un de ces deux pays ou dans un âutre pays, ou qu’il s’agisse d’œuvres non publiées, des droits que les lois respectives accordent actuellement ou accorderont par la suite aux nationaux, ainsi que des avantages spécialement stipulés dans la présente Convention.

Les stipulations de cette Convention s’appliquent également à toute œuvre littéraire ou artistique publiée pour la première fois dans l’un des deux pays contractants et dont l’auteur n’appartient pas à la nationalité de l’un de ces pays.

Art. 2. — L’expression ‘ œuvres littéraires, et artistiques comprend toute production du domaine littéraire, scientifique ou artistique, quels qu’en soient le mode et la forme de reproduction et quels que soient le mérite et la destination de l’œuvre, telle que : les livres, brochures et autres écrits, les discours, leçons, conférences et sermons : les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales, les œuvres chorégraphiques et les pantomimes, dont la mise en scène est fixée par écrit ou autrement, ainsi que les productions cinématographiques ayant un caractère personnel et original ; les compositions musicales avec ou sans paroles : les œuvres de dessin, de peinlure, d’architecture et de sculpture ; les médailles et plaquettes ; les œuvres de gravure et de lithographie ; les illustrations ; les cartes géographiques ; les plans, croquis et ouvrages plastiques, relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture, aux sciences ou à la mise en scène d’une œuvre dramatique ou dramatico-musicale, etc, : les phot ographies et autres œuvres obtenues par un procédé analogue à la photographie.

Art. 3. — Les auteurs de chacun des deux pays jouissent, dans lPautre pays, du droit exclusif de faire ou d’autoriser la traduction de leurs ouvrages, jusqu’à lFexpiration de dix années à partir de la publication de l’œuvre originale, à la condition de s’être réservé ce droit sur la page du titre ou dans la préface.

Le droit exclusif de traduction cesce d’avis ter lorsque Fauteur n’en à pas fait usage dans un délai de cinq ans à partir de la publication de l’œuvre originale, en publiant -ou en faisant publier une traduction de son ouvrage.

IL est toutefois entendu que le délai susmentionné de cinq ans sera réduit à trois ans pour l’usage du droit de traduction des œuvres scientifiques, techniques et destinées là l’enseignement,

Pour les ouvrages composés de plusieurs volumes publiés par intervalles, ainsi que pour les cahiers ou numéros de recueils périodiques, les délais sus-mentionnés comptent à dater de la publication de chaque volume, cahier ou numéro et, pour les ouvrages publiés par livraisons, à dater de la publication de la dernière livraison de œuvre originale, si les intervalles entre la publication des livraisons ne dépassent pas deux ans et, dans le cas contraire, à dater de la publication de chaque livraison.

 

Dans les cas prévus au présent article, est admis comme date de publication, pour le calcul des délais de protection, le 1er janvier de l’année dans laquelle ouvrage a été publié.

 

Art. 4. — Le traducteur, sans préjudice des droits de l’auteur de l’œuvre originale, jouit des droits d’auteur sur sa traduction.

 

Art, 5, — Sont spécialement comprises parmi les reproductions illicites auxquelles s’applique la présente Convention les appropriations indirectes, non autorisées, d’un ouvrage littéraire ou artistique, telles que :

adaptations, arrangements de musique, transformations d’un roman, d’une nouvelle ou d’une poésie en pièce de théâtre et réciproquement, lorsqu’elles ne sont que la reproduction de cet ouvrage dans la même forme ou sous une autre forme, avec des changements, additions ou retranchements non essentiels, sans présenter le caractère d’une nouvelle œuvre originale,

 

Art. 6. — A l’exception des romans-feuilletons et des nouvelles, les articles de journaux ou de recueils périodiques, publiés dans l’un des deux pays, peuvent être reproduits, en original ou en traduction, dans Pautre pays, à moins que la reproduction n’en ait été expressément interdite.

La protection de la présente Convention ne s’applique pas aux nouvelles du jour ou aux faits-divers qui ont le caractère de simples informations de presse.

 

Art, 7. — En ce qui concerne la faculté de faire licitement des emprunts X des œuvres littéraires et artistiques pour des publications destinées à l’enseignement ou ayant un caractère scientifique, ou pour des chrestomathies, est réservé l’effet de la législation du pays dans lequel ladite publication est faite.

 

Art. 8 — Dans tous les cas où la présente Convenlion autorise des emprunts à des œuvres litiéraires et artistiques, la source doit être indiquée ; la sanction de cette obligation est déterminée par la législation du pays où la protection est réclamée.

 

Art. 9. — Les auteurs d’œuvres dramatiques et dramatico-musicales, que ces œuvres soient publiées ou non, sont protégés contre la representation publique de celles-ci en orisginal, pendant la durée de leur droit d’auteur sur l’original et le sont contre la représentation publique en traduction pendant la durée de leur droit de traduction,

 

Art. 10, — Les auteurs d’œuvres musicales sont protégés contre Pexécution publique de celles-ci, lorsqu’ils ont indiqué sur chaque exemplaire imprimé de louvrage qu’ils l’interdisent,

Les exceptions a cette disposition sont réglées par la législation intérieure de chacun des deux pays contractants,

 

Art. 11. — La reproduction et lexécution publique des œuvres musicales par des instruments mécaniques ne peuvent être faites sans le consentement de Pauteur, sauf l’application des réserves et conditions déterminées à cet égard par la loi intérieure du pays où la protection est réclamee.

 

Art, 12. — Les œuvres obtenues par la photographie ou par un procédé analogue à la photographie ne sont protégées que si chaque exemplaire de lPœuvre porte l’indication de la raison sociale ou des nom, prénoms et domicile de l’auteur ou de l’éditeur de l’œuvre ainsi que Pannée de la publication.

Celles de ces œuvres qui sont insérées dans un ouvrage publié sont, jusqu’à preuve du contraire, réputées avoir paru pour la première fois avec cet ouvrage et les mentions de nom et de date portées sur ledit ouvrage suffisent à leur égard.

 

Art. 13. — La reproduction des œuvres littéraires et artistiques par la cinématograhie ou par tout autre procédé analogue ne peut être faite sans le consentement de l’auteur.

Sans préjudice des droits de l’auteur de l’œuvre originale, la reproduction, par la cinématographie ou par tout autre procédé analogue, d’une œuvre littéraire ou artistique, est protégée comme une œuvre originale,

 

Art. 14. — Sous la réserve des dispositions de Particle 3 (alinéa 1er) de l’article 10 et de l’article 12 (alinéa 1er), ci-dessus, la jouissance des droits stipulés par la présente Convention n’est subordonnée à l’accomplissement d’aucune condition ou formalhte.

Pour que les auteurs des ouvrages protegés par la présente Convention soient, jusqu’à preuve du contraire, considérés comme tels et admis, en conséquence, devant les tribunaux des deux hautes parties contractantes, à exercer des poursuites contre les contrefacteurs, il suffit que leur nom soit indiqué sur l’ouvrage en la matière usitée.

Pour les œuvres anonymes ou pseudonymes, l’éditeur, dont le nom est indiqué sur l’ouvrage, est fondé à sauvegarder les droits appartenant à l’auteur. Il est, sans autre preuve, réputé ayant-cause de l’auteur anonyme ou pseudonyme.

 

Art. 15, — La durée de protection accordée par la présente Convention aux œuvres littéraires et artistiques publiées en original ou én traduction, ou non publiées, aux œuvres photographiques ou obtenues par un procédé analogue à la photographie, aux œuvres posthumes, aux œuvres anonymes ou pseudonymes, est réglée par les lois du pays où la protection est rèclamèe.

Mais il est entendu que, dans celui des deux pays où la protection est réclamée, l’œuvre ne pourra bénéficier d’une durée plus longue que celle accordée par la loi du pays contractant dont l’auteur est ressortissant ou dans lequel l’œuvre a été publiée pour la première fois.

Art. 16. — Les dispositions de la présente Convention ne peuvent porter préjudice, en quoi que ce soit, au droit qui appartient au gouvernement de chacun des deux pays contractants de permettre, de surveiller, d’interdire, par des mesures de législation ou de police intérieure, la circulation, la représenation, l’exposition de tout ouvrage ou production à l’égard desquels l’autorité compétente aurait à exercer ce droit.

 

Arf, 17, — La présente Convention s’applique à toutes les œuvres qui, au moment de son entrée en vigueur, ne sont pas encore tombées dans le domaine public de leur pays d’ origine.

Il est toutefois entendu que les œuvres, licitement publiées avant l’entrée en vigueur de la Convention, ne pourront être l’objet de poursuites basées sur ses dispositions, Dans l’année qui suivra la mise en vigueur de la Convention, pourront être publiés les volumes et livraisons nécessaires pour l’Pachèvement des ouvrages licitement en cours de publication, dont une partie aurait déjà paru avant son entrée en vigueur.

 

Art, 18. — La présente Convention est applicable sur tout le territoire de chacune des hautes parties contractantes, y compris leurs colonies et possessions.

 

Art. 19. — Les hautes parties contractantes conviennent que lout avantage ou privilège plus étendu qui serait ultérieurement accordé par lune d’elles à une tierce puissance, en ce qui concerne la protection des œuvres lilléraires et artistiques, sera, sous condition de réciprocité, acquis de plein droit aux auteurs de Pautre pays ; sont toutefois exceptés les avantages ou privilèges concédés en vertu de conventions d’union internationale auxquelles Pune des hautes parties cont ractantes pourrait adhérer.

 

Art, 20, — La présente Convention entrera en vigueur six mois après l’échange des ratifications, Sa durée sera de trois années à partir de cette date,

Elle continuera ses effets jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an, à compter du jour où elle aura été dénoncée par l’une des hautes parles contractantes.

Art.21- La présente Convention sera ratifiée et les ratifications en seront échangées à Paris le plus tôt possible.

 

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé la présente Convention et Pont revêtue de leurs cachets.

 

Fait à Paris. en double exemplaire, le 29 novembre 1911.

(L. S.) Signé : J. de SELVES.

(L. S.) Signé : ISWOLSKY.

 

 

Art, 22, — Le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères ; le Ministre de l’Intérieur, le Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts et le Ministre des Colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décre.

A. FALLIÈRES.

Par le Président de la République :

Le Président du Conseil,

Ministre des Affaires Etrangères,

R. POINCARÉ.

Le Miunistre de l’Intérieur,

T. STEEG.

Le Ministre de l’Instruction publique

et des Beaux-Arts,

GUIST’ HAU.

Le Ministre des Colonies,

 

À, LEBRUN.