إجراء بحث

Décret n° 63-55 portant règlement d’administration publique pour l’application aux territoires de la Polynésie française, de Saint-Pierre et Miquelon et de la Côte française des Somalis de la loi n° 51-59 du 18 janvier 1951 relative au nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement.

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre d’Etat chargé des départements et territoires d’outre-mer et du garde des sceaux, ministre de la justice,

Vu la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce ;

Vu le décret du 19 mars 1932 portant règlement d’administration publique pour la détermination des conditions d’application dans l’île de Tahiti de la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce ;

Vu le décret n” 54-561 du 28 mai 1954 rendant applicables dans les territoires relevant du ministère de la France d’outremer où elles n’avaient pas encore été étendues les dispositions de la loi du 19 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce, telles que modifiées par les lois postérieures, et portant extension dans les autres territoires des dispositions des articles 1er et 2 de la loi du 11 mars 1949,

modifiées par celles de l’article 54 de la loi de finances du 14 avril 1952 ;

Vu la loi n° 51-59 du 18 janvier 1951 relative au nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement, notamment l’article 24 qui y a été ajouté par la loi n° 55-990 du 27 juillet 1955 et aux termes duquel des règlements d’administration publiqu détermineront les conditions d’application de la présente loi aux territoires relevant du ministre de la France d’outre-mer, ensemble le décret n° 53-969 du 30 septembre 1953 comportant assouplissement de certaines dispositions de la loi du 18 janvier 1951 ;

Vu le décret n° 51-194 du 17 février 1951 portant, en ce qui concerne les formalités d’inscription des privilèges, règlement d’administration publique pour l’application de la loi du 18 janvier 1951 relative au nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement ;

Vu le décret n » 57-812 du 22 juillet 1957 portant institution d’un conseil de gouvernement et extension des attributions de l’assemblée territoriale dans les Etablissements de l’Océanie ;

Vu l’ordonnance n° 58-1337 du 23 décembre 1958 relative au conseil de gouvernement et à l’assemblée territoriale de la Polynésie française ;

Vu le décret n° 46-2380 du 25 octobre 1946 et le décret n° 57-815 du 22 juillet 1957 relatif au conseil général de SaintPierre et Miquelon ;

Vu le décret n° 57-813 du 22 juillet 1957 portant institution d’un conseil de gouvernement et extension des attributions de l’assemblée territoriale en Côte française des Somalis ;

Le Conseil d’Etat entendu,

DECRETE

Art. 1er. — Dans les territoires de la Polynésie française, de Saint-Pierre et Miquelon et de la Côte française des Somalis, le paiement du prix d’acquisition de l’outillage et du matériel d’équipement professionnel peut être garanti, soit vis-à-vis du vendeur, soit vis-à-vis du prêteur qui avance les fonds nécessaires au paiement du vendeur, par un nantissement restreint à l’outillage ou au matériel ainsi acquis.

Si l’acquéreur a la qualité de commerçant, ce nantissement est soumis, sous réserve des dispositions ci-après, aux règles édictées par l’article 10 de la loi du 17 mars 1909 susvisée en ce qüi concerne Saint-Pierre et Miquelon et la Côte française des Somalis et par l’article 10 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie, sans qu’il soit nécessaire d’y comprendre les éléments essentiels du fonds.

Si l’acquéreur n’a pas la qualité de commerçant, le nantissement est soumis aux dispositions de l’article 16 ci-après.

Art. 2. — Le nantissement est consenti par un acte authentique ou sous seing privé enregistré à un droit fixe dont le taux sera déterminé par délibération de l’assemblée territoriale en Polynésie française et en Côte française des Somalis, du conseil général à Saint-Pierre et Miquelon.

Lorsque le nantissement est consenti au vendeur, il est donné dans l’acte de vente.

Lorsqu’il est consenti au prêteur qui avance les fonds nécessaires au paiement du vendeur, le nantissement est donné dans l’acte de prêt.

Cet acte doit mentionner, à peine de nullité, que les deniers versés par le prêteur ont pour objet le paiement du prix des biens acquis.

Les biens acquis doivent être énumérés dans le corps de l’acte et chacun d’eux doit être décrit d’une façon précise, afin de l’individualiser par rapport aux autres biens de même nature appartenant à l’entreprise. L’acte indique également le lieu où les biens ont leur attache fixe ou mentionne, au cas contraire, qu’ils sont susceptibles d’être déplacés.

Sont assimilées aux prêteurs de deniers les cautions qui interviennent par aval, par acceptation ou autrement, dans l’octroi des crédits d’équipement.

Art. 3. — A peine de nullité, le nantissement doit être inscrit, dans un délai de quinze jours à compter de la date de l’acte constitutif du nantissement, sur un registre public tenu au greffe de la juridiction commerciale locale.

Le nantissement doit être conclu au plus tard dans le délai d’un mois de la livraison du matériel.

Art. 4. — Les biens donnés en nantissement par application du présent décret peuvent en outre, à la requête du bénéficiaire du nantissement, être revêtus, sur une pièce essentielle et d’une manière apparente, d’une plaque fixée à demeure indiquant le lieu, la date et le numéro d’inscription du privilège dont ils sont grevés.

Conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi modifiée du 18 janvier 1951 et sous peine des sanctions prévues à l’article 21 de ladite loi, le débiteur ne peut faire obstacle à cette apposition et les marques ainsi apposées ne peuvent être détruites, retirées ou recouvertes avant l’extinction ou la radiation du privilège du créancier nanti.

Art. 5. — Toute subrogation conventionnelle dans le bénéfice du nantissement doit être mentionnée en marge de l’inscription dans la quinzaine de l’acte authentique ou sous seing privé qui la constate, sur remise au greffier d’une expédition ou d’un original dudit acte.

Les conflits qui peuvent se produire entre les titulaires d’inscriptions successives sont réglés conformément à l’article 1252 du code civil.

Art. 6. — Le bénéfice du nantissement est transmis de plein droit, conformément à l’article 1692 du code civil, aux porteurs successifs des effets qu’il garantit, soit que ces effets aient été souscrits ou acceptés à l’ordre du vendeur ou du prêteur ayant fourni tout ou partie du prix, soit plus généralement qu’ils représentent la mobilisation d’une créance valablement gagée suivant les dispositions du présent décret.

Si plusieurs effets sont créés pour représenter la créance, le privilège attaché à celle-ci est exercé par le premier poursuivant pour le compte commun et pour le tout.

Art. 7. — Conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi modifiée du 18 janvier 1951 et sous peine des sanctions prévues à l’article 21 de ladite loi, le débiteur qui, avant paiement ou remboursement des sommes garanties conformément au présent décret, veut vendre à l’amiable tout ou partie des biens grevés doit solliciter le consentement préalable du créancier nanti et, à défaut, l’autorisation du juge des référés du tribunal de commerce ou de la juridiction en tenant lieu, statuant en dernier ressort.

Lorsqu’il a été satisfait aux exigences de publicité requises par le présent décret et que les biens grevés ont été revêtus d’une plaque conformément à l’article 4 ci-dessus, le créancier

nanti ou ses subrogés disposent du droit de suite prévu à l’article 22 de la loi du 17 mars 1909 en ce qui concerne SaintPierre et Miquelon et la Côte française des Somalis, à l’article 22 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie française.

Art. 8. — Le privilège du créancier nanti en application du présent décret s’exerce si le bien qui est grevé devient immeuble par destination.

L’article 2133 du code civil n’est pas applicable aux biens nantis.

Art. 9. — Le privilège du créancier nanti en application du présent décret s’exerce sur les biens grevés, par préférence à tous autres privilèges, à l’exception : /

1° Du privilège des frais de justice ;

2° Du privilège des frais faits pour la conservation de la chose ;

3° Du privilège accordé aux salariés par l’article 2101 (4°) du code civil, par le code du travail outre-mer et par le code du commerce.

Il s’exerce notamment à l’encontre de tout créancier hypothécaire et par préférence au privilège du Trésor, au privilège du vendeur du fonds de commerce à l’exploitation duquel est affecté le bien grevé ainsi qu’au privilège du créancier nanti sur l’ensemble dudit fonds.

Toutefois, pour que son privilège soit opposable au créancier hypothécaire, au vendeur du fonds de commerce et au créancier nanti sur l’ensemble dudit fonds, préalablement inscrit, le bénéficiaire du nantissement conclu en application du présent décret doit signifier auxdits créanciers, par acte extra-judiciaire, une copie de l’acte constatant le nantissement. Cette signification doit, à peine de nullité, être faite dans les deux mois de la conclusion du nantissement.

Art. 10. — Sous réserve des dérogations prévues par le présent décret, le privilège du créancier nanti est régi par les dispositions du chapitre III de la loi du 17 mars 1909 susvisée en ce qui concerne les formalités d’inscription, les droits des créanciers en cas de déplacement du fonds, les droits du bailleur de l’immeuble, la purge desdits privilèges et les formalités de mainlevée.

Art. 11. — L’inscription conserve le privilège pendant cinq ans à compter de sa régularisation définitive.

Elle garantit, en même temps que le principal, deux années d’intérêts. Elle cesse d’avoir effet si elle n’a pas été renouvelée avant l’expiration du délai ci-dessus ; elle peut être renouvelée deux fois.

Art. 12. — L’état des inscriptions existantes, en application de l’article 32 de la loi du 17 mars 1909 en ce qui concerne Saint-Pierre et Miquelon et la Côte française des Somalis et de l’article 32 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie française, doit comprendre les inscriptions prises en vertu du présent décret. Il peut être également délivré au requérant, sur sa demande, un état attestant seulement qu’il existe ou n’existe pas sur les biens désignés des inscriptions prises.

Art. 13. — La notification, dans les formes prescrites par l’article 20 de la loi du 17 mars 1909 en ce qui concerne Saint-Pierre et Miquelon et la Côte française des Somalis et de l’article 20 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie française, de poursuites engagées en vue de parvenir à la réalisation forcée de certains éléments du fonds, auquel appartiennent les biens grevés du privilège du vendeur ou du privilège du nantissement en vertu du présent décret, rend exigibles les créances garanties par ces privilèges.

Art. 14. — En cas de non-paiement à l’échéance, le créancier bénéficiaire du privilège établi par le présent décret peut poursuivre la réalisation du bien qui en est grevé dans les conditions prévues à l’article93 du code de commerce. L’officier public chargé de la venteest désigné, à sa requête, par le président de la juridiction commerciale locale. Le créancier doit, préalablement à la vente, se conformer aux dispositions de l’article 20 de la loi du 17 mars 1909 en ce qui concerne Saint-Pierre et Miquelon et la Côte française des Somalis et de l’article 20 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie française.

Le créancier nanti aura la faculté d’exercer la surenchère du dixième prévue à l’article 23 de la loi du 17 mars 1909.

Art. 15. — Les biens grevés en vertu du présent décret dont la vente est poursuivie avec d’autres éléments du fonds sont l’objet d’une mise à prix distincte ou d’un prix distinct si le cahier des charges oblige l’adjudicataire à les prendre à dire d’expert.

Dans tous les cas, les sommes provenant de la vente de ces biens sont, avant toute distribution, attribuées aux bénéficiaires

des inscriptions, à concurrence du montant de leur créance en principal, frais et intérêts conservés par lesdites inscriptions.

La quittance délivrée par le créancier bénéficiaire du privilège n’est soumise qu’à un droit fixe dont le taux sera déterminé par délibération de l’assemblée territoriale.

Art. 16. — Si l’acquéreur n’a pas qualité de commerçant, le nantissement est soumis aux dispositions des articles 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 12 et 13 ci-dessus et du présent article.

L’inscription prévue à l’article 3 du. présent décret est alors prévue au greffe de la juridiction commerciale locale.

4 A défaut de paiement à échéance, le créancier bénéficiaire du privilège établi par le présent décret peut faire procéder à la vente publique du bien grevé, conformément aux dispositions de l’article 93 du code du commerce.

Les inscriptions sont rayées soit du consentement des parties intéressées, soit en vertu d’un jugement passé en force de chose jugée.

A défaut de jugement, la radiation totale ou partielle ne peut être opérée par le greffier que sur le dépôt d’un acte authentique de consentement donné par le créancier.

Lorsque la radiation non consentie par le créancier est demandée par voie d’action principale, cette action est portée devant la juridiction commerciale locale.

La radiation est opérée au moyen d’une mention faite par le greffier en marge de l’inscription.

Il en est délivré certificat aux parties qui le demandent.

Art. 17. — Pour l’application du présent décret, les greffiers sont assujettis aux diligences et responsabilités édictées à l’article 33 de la loi du 17 mars 1909 en ce qui concerne SaintPierre et Miquelon et la Côte française des Somalis et à l’article 33 du décret du 19 mars 1932 en ce qui concerne la Polynésie française.

Leurs émoluments sont déterminés conformément à la réglementation locale en vigueur dans ces territoires.

Art. 18. — Ne sont pas soumis à l’application du présent décret :

1° Le matériel ayant fait l’objet des avances prévues par les décrets des 7 avril 1940 et 17 août 1950 relatifs aux marchés passés par les territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer ;

2° Les véhicules automobiles auxquels s’applique le décret n° 55-639 du 20 mai 1955 ;

3″ Les navires de mer et les bateaux de navigation fluviale ;

4° Les aéronefs auxquels s’applique la loi du 31 mai 1924.

Art. 19. — Conformément à l’article 21 de la loi du 18 janvier 1951 et sous peine des sanctions prévues audit article, il est interdit à tout acquéreur ou détenteur de biens nantis de les détruire ou de tenter de les détruire, de les détourner ou de tenter de les détourner, ou enfin de les altérer ou de tenter de les altérer d’une manière quelconque, en vue de faire échec aux droits du créancier.

Sont interdites, dans les mêmes conditions, toutes manœuvres frauduleuses destinées à priver le créancier de son privilège sur les biens nantis ou à le diminuer.

Art. 20. — Un arrêté du chef du territoire déterminera, en ce qui concerne les formalités de l’inscription du privilège, les conditions d’application du décret du 17 février 1951 susvisé dans les territoires intéressés.

Art. 21. — Le ministre d’Etat chargé des départements et territoires d’outre-mer et le garde des sceaux, ministre de la justice, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

 

GEORGES POMPIDOU.

Le ministre d’Etat chargé des départements

et territoires d’outre-mer,

LOUIS JACQUINOT.

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

JEAN FOYER.