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Circulaire n° 01-201-1913 relative à la protection des colonies et pays de protectorat contre la propagation des maladies des végétaux.

Le Ministre des Colonies à Messieurs les Gouverneurs Généraux, Gouverneurs des Colonies, Administrateur des lies Saint-Pierre et Miquelon Vous trouverez au Journal Officiel de la République Française n° 128 du 14 mai dernier, page 4128, un rapport suivi d’un décret eu date du 6 du même mois qui donne au Ministre des Colonies le pouvoir de réglementer dans les Colonies et pays de protectorat autres que l’Algérie, la Tunisie et le Maroc, l’entrée et la circulation des végétaux et. matériaux divers susceptibles de propager des maladies s’attaquant aux plantes utiles.

J’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien assurer l’exécution des prescriptions édictées par le décret précité.

Je crois devoir d’ailleurs vous donner ci-après quelques indications complémentaires qui vous permettront de mieux saisir le but poursuivi et de faciliter la mise en vigueur des mesures à prendre dans l’intérêt de l’agriculture coloniale.

1° Le décret du 6 mai se trouve complété par un décret antérieur, en date du 4 mars 1912, qui a modifié la composition du Comité des Epiphyties, créé le 19 février 1912, en appelant le Directeur du Jardin Colonial et le Professeur de Pathologie végétale de l’Ecole supérieure d’agriculture coloniale, à faire partie, comme Membres de droit, de cette commission consultative.

Cette décision a pour conséquence de permettre au Ministre des Colonies de demander l’avis du Comité consultatif des Epiphyties qui est composé des spécialistes les plus autorisés et les plus compétents, sur toutes propositions faites par les Administrations locales au point de vue phytopathologique. Grâce

au concours de ce Comité, les mesures prescrites par le Département des Colonies, sur la demande des Gouverneurs Généraux et Gouverneurs présenteront au point de vue technique toutes les garanties désirables et permettront de réduire au minimum les chances de contamination qu’il est malheureusement impossible d’éviter d’une manière complète.

2° Le décret du 6 mai donne au Ministre des Colonies des pouvoirs analogues à ceux du Ministre de l’Agriculture, au point de vue de l’entrée et de la circulation des plantes ou matériaux capables de propager les maladies c’est-à-dire la possibilité de prendre sans retard toutes les mesures que comporte, par exemple. une situation dangereuse, comme l’application d’une grave affection parasitaire dans une région voisine d’une Colonie où elle est encore inconnue. La réglementation antérieure exigeait que ces mesures fassent l’objet pour chaque cas particulier, d’un décret en Conseil d’Etat. Il en résultait une perte de temps considérable, malheureusement inévitable et susceptible d’avoir les plus graves conséquences.

D’un autre côté, les arrêtés locaux pris jusqu’à ce jour pour prohiber ou réglementer l’introduction de certaines plantes étaient, en fait, irréguliers et auraient pu donner lieu à de sérieuses difficultés pour l’Administration la nouvelle réglementation permet de supprimer tous les inconvénients puisqu’il suffira, à l’avenir, d’un arrêté ministériel pris, après avis au Comité consultatif des Epiphyties, pour rendre régulièrement et immédiatement applicables les mesures de protection reconnues nécessaires.

3° Dans la majorité des cas, l’initiative au point de vue réglementation phytopathologique devra venir des Colonies intéressées ;

toutefois l’Administration Centrale ne manquera pas de communiquer aux Gouverneurs Généraux et Gouverneurs tous les renseignements susceptibles de les éclairer et de leur permettre de soumettre au département après enquête sur place, des propositions motivées. Ces propositions seront soumises sans retard par les soins du Directeur du Jardin Colonial à l’examen du Comité Consultatif des Epiphyties et rendues applicables par arrêté ministériel, dans la mesure jugée convenable par le Ministre des Colonies.

Le décret du 6 mai 1913 ayant pour effet d’abroger toutes les réglementations antérieures, les administrations locales auront pour devoir de transmettre, sans retard leurs propositions au Ministre des Colonies, au sujet des mesures à prendre à l’égard des maladies déjà connues et signalées (Hemileia vastatrix, Phytalus, Smithi ou ver blanc de la canne à sucre, Oryctes du cocotier, etc., etc.)

4° Lors de l’apparition reconnue dangereuse d’un nouveau parasite ou d’une ‘nouvelle maladie dans un centre agricole ou à proximité d’une région encore indemne, la Colonie intéressée a pour devoir de prévenir télégraphiquement l’Administration Centrale et de ne pas hésiter à réclamer par la même voie l’application immédiate de mesures énergiques. Elle doit, en même temps, procéder sans aucun retard à l’envoi au Ministère d’échantillons convenablement récoltés accompagnés de tous les renseignements qu’il

est possible de recueillir, afin de permettre au Jardin Colonial de faire déterminer le parasite incriminé et d’indiquer, autant que possible, les précautions à prendre. En utilisant les résultats de ces études et des enquêtes faites sur place, le département pourra ainsi examiner la possibilité d’atténuer la sévérité des mesures prises au début qui, pour être efficaces, doivent être rigoureuses :

mais il est bien évident que rien ne doit être négligé, tant en France que dans la Colonie pour réduire au strict minimum la gène qui peut résulter pour le commerce, l’agriculture ou l’industrie. Agir vite et avec fermeté, dans un pareil cas, doit être considéré comme une des précautions les plus utiles et les plus indispensables.

5° La réglementation du 6 mai se trouve également complétée par les améliorations apportées tout récemment à la section des recherches phytopathologiques du Jardin Colonial qui s’est assuré, pour toutes les études de cette nature, le concours de deux attachés phytopathologiques auxquels le Ministre de l’Agriculture vient de donner accès dans tous les laboratoires spéciaux de Département Ministériel (Station Entomologique de Paris, Station de Pathologie végétale etc.).

Le Jardin Colonial se trouve ainsi en mesure, comme vous l’a déjà signalé une autre circulaire ministérielle récente, de poursuivre dans de meilleures conditions que par le passé les recherches scientifiques qui seules pourront permettre d’arriver, avec le concours indispensable des services techniques locaux, à trouver les meilleurs moyens de lutte et de défense à conseiller aux planteurs.

Les Administrations locales auront dans ces conditions intérêt à transmettre au fur et à mesure au Jardin Colonial, même lorsqu’il ne s’agit pas d’affections paraissant dangereuses, tous les renseignements et tous les matériaux d’études qu’il sera possible de recueillir sur les maladies et parasites des plantes utiles en tenant compte des indications pratiques données par l’Etablissement Colonial de Nogent pour que les envois d’échantillons parviennent à destination en bon état de conservation. 

J.-B. MOREL.