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Loi n° 16/AN/23/9ème L Relative aux aires protégées.

L'ASSEMBLÉE NATIONALE A ADOPTÉ
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE PROMULGUE
LA LOI DONT LA TENEUR SUIT :

L’ASSEMBLEE NATIONALE A ADOPTE LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE PROMULGUE LA LOI DONT LA TENEUR SUIT
VU La Constitution du 15 septembre 1992 ;
VU La Loi n°92/ AN/10/ 6ème L du 21 avril 2010 portant révision de la Constitution ;
VU La Loi n°87/AN/95/3ème L du 02 Juillet 1995 portant ratification de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques ;
VU La Loi n°113/AN/96/3ème L du 03 septembre 1996 portant ratification de la Convention sur la Diversité Biologique ;
VU La loi n°59/ AN/94 du 05 janvier 1995 portant Code Pénal ;
VU La Loi n°148/AN/01/4ème L du 31 décembre 2001 portant ratification du Protocole de Kyoto relatif à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques ;
VU La Loi n°121/AN/01/4ème L du 01 avril 2001 portant approbation du Plan d’Action National pour l’Environnement 2001-2010 ;
VU La Loi n°187/ AN/ 02/4ème L du 09 septembre 2002 portant approbation de Code de Pêche ;
VU La Loi n°149/AN/02/4ème L du 31 janvier 2002 portant approbation de L’orientation économique et sociale de la République de Djibouti ;
VU La Loi n°186/ AN/ 02/4ème L du 09 septembre 2002 portant ratification de la Convention sur les Zones Humides/Convention de Ramsar ;
VU La Loi n°045/ AN/04 sur les aires marines et terrestres protégées ;
VU La Loi n°051/AN/09/6ème L du 01 juillet 2009 portant Code de l’environnement ;
VU La Loi n°154/AN/22/8ème L du 17 mai 2022 portant organisation et fonctionnement du ministère de l’Environnement et de Développement Durable ;
VU Le Décret n°2001-0098/PR/MHUEAT du 27 mai 2001 portant approbation de la Stratégie et Programme d’Action National pour la conservation de la Biodiversité ;
VU Le Décret n°2004-0092/PR/MHUAT du 29 Mai 2004 portant création d’une Commission Nationale pour le Développement Durable ;
VU Le Décret n° n°2021-105/PRE du 24 mai 2021 portant nomination du Premier Ministre ;
VU Le Décret n° n°2021-106/PRE du 24 mai 2021 portant nomination des membres du Gouvernement ;
VU Le Décret n°2021-114/PRE du 31 mai 2021 fixant les attributions des Ministères ;
VU Le Décret n°2022-001/PRE du 02 janvier 2022 portant remaniement Ministériel ;
VU La Circulaire n°136/PAN du 19/05/2024 portant convocation de l’Assemblée nationale en séance publique ;
Le Conseil des Ministres entendu en sa séance du 02 Mai 2023.
A ADOPTÉ, EN SA TROISIEME SEANCE PUBLIQUE DU 22/05/2024, LA LOI DONT LA TENEUR SUIT :

TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

I : DEFINITIONS ET TYPOLOGIE SECTION

I : DEFINITIONS

Article 1 : Au sens de la présente loi, on entend par :

– Aire protégée : Tout espace terrestre et/ ou marin, géographiquement délimité, dûment reconnu et spécialement aménagé et géré aux fins d’assurer la protection, le maintien et l’amélioration de la diversité biologique, la conservation du patrimoine naturel, sa mise en valeur, sa réhabilitation pour un développement durable, ainsi que la prévention de sa dégradation.

– Aire marine protégée : une région intertidale ou subtidale de même que les eaux la recouvrant, ainsi que la flore, la faune et les caractéristiques historiques et associées ;

– Aire Protégée communautaire : une Aire Protégée instituée et gérée svolontairement par les communautés locales en vue de la conservation et de l’utilisation durable des ressources naturelles, de la préservation des coutumes et du patrimoine et spirituel associé ainsi que des pratiques et des usages traditionnels durables ;

– Cogestion : la coopération et le partage des responsabilités entre le gestionnaire de l’Aire Protégée et les parties prenantes concernées dans la conception et dans l’exercice des modalités de gestion ;

– Conservation des valeurs particulières du patrimoine naturel :
la garantie de la représentativité de la biodiversité unique, la conservation du patrimoine et le maintien des services éco-systémiques ;

– Défrichement : des opérations volontaires ayant pour effet de détruire l’état boisé d’un terrain et de mettre fin à sa destination forestière ou entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences, sauf si elles sont entreprises conformément au plan d’aménagement et de gestion ;

– Droits d’usage : des prélèvements de ressources naturelles à des fins non commerciales pour satisfaire les besoins domestiques, vitaux ou coutumiers, de la population locale résidente.
Ils sont incessibles et s’exercent dans le cadre de la Convention de gestion communautaire ;

– Ecotourisme : un tourisme responsable et durable basé sur la conservation du patrimoine naturel de Djibouti, soucieux d’assurer la pérennité des écosystèmes en respectant l’environnement et les populations tout en assurant une redistribution équitable des retombées économiques ;

– Gestion d’une Aire Protégée : conduite de toutes les actions à mener au niveau d’une Aire Protégée, et dont la finalité est de permettre de remplir d’une manière pérenne leurs fonctions écologiques, économiques et sociales ;

– Gestionnaire d’une Aire Protégée : toute personne publique ou privée, le groupement mixte, le groupement légalement constitué ou la communauté locale assurant la gestion de l’Aire Protégée en collaboration avec les parties prenantes concernées ;

– Plan d’aménagement et de gestion : le document et ses annexes présentant les mesures prévues pour assurer la conservation et la gestion durable d’une Aire Protégée ;

– Réseau : ensemble d’Aires protégées reliées entre elles autour d’objectifs communs, de principes de gestion communs, de gestionnaire commun ou d’intérêts communs ;

– Système des Aires Protégées : l’ensemble structuré des Aires Protégées existantes et à créer représentatif de la biodiversité Djiboutienne et autres valeurs en vue d’en assurer la durabilité ;

– Ressources naturelles : ensemble des ressources biologiques renouvelables, minérales ou pétrolifères non renouvelables qu’offre l’Aire Protégée ;

-Activité extractive : toute activité de recherche ou d’exploration ou d’exploitation ou de prélèvement des ressources naturelles non renouvelables à l’intérieur d’une Aire Protégée spécialement destinée pour ce genre d’activité et avec une autorisation préalable des autorités compétentes ;

– Réserve Naturelle Intégrale : une aire représentative d’un éco-système particulier dont le but est de protéger des valeurs particulières, notamment biologiques et naturelles dans un périmètre délimité tenant dûment compte des spécificités et coutumes Djiboutiennes ;

– Parc National : une aire affectée à la protection et à la conservation d’un patrimoine naturel original d’intérêt national, tout en offrant un cadre récréatif et éducatif ;

– Parc Naturel : une aire d’intérêt régional ou communal, affectée à la protection et à la conservation d’un patrimoine naturel original tout en offrant un cadre récréatif et éducatif ;

– Réserve Spéciale : une Aire Protégée gérée principalement à des fins de conservation des habitats ou des espèces ;

– Monument Naturel : une Aire Protégée gérée principalement dans le but de préserver des éléments naturels spécifiques associés à la biodiversité ;

– Paysage Harmonieux Protégé : une Aire Protégée où les interactions entre l’Homme et la Nature contribuent au maintien de la biodiversité et des valeurs esthétiques, culturelles et cultuelles et au développement économique et social.

SECTION II : DU STATUT ET CLASSIFICATIONS DES AIRES PROTEGEES

Article 2 : Une aire protégée peut être subdivisée en zones continues ou discontinues relevant de régimes de protection différents, compte tenu des objectifs d’aménagement, des contraintes découlant de l’état des lieux et des sujétions justifiées par les besoins et les activités des populations qui y sont installées.
A l’extérieur de ladite aire protégée, une zone périphérique peut également être prévue pour constituer une ceinture de protection contre les nuisances externes.

Article 3 : L’Etat veille à assurer une protection juridique adéquate aux sites dotés de labels internationaux, tels que les sites Ramsar, les Réserves de la Biosphère et les Sites du Patrimoine Mondial qui ont vocation à être érigés en Aires Protégées afin de promouvoir leur valeur universelle et garantir leur gestion efficiente dans le contexte national.
Chaque nouveaux statuts et/ou Réseau d’Aires Protégées peuvent être crées par voie réglementaire.
Les Aires Protégées publiques demeurent la propriété de l’Etat, représenté par le Ministère de l’Environnement.

Article 4 : Une aire protégée est classée par l’administration compétente, en fonction de ses caractéristiques, de sa vocation et de son envergure socio-économique, dans l’une des catégories suivantes :

– parc naturel ;

– réserve biologique ;

– réserve naturelle ;

– site naturel.

Article 5 : Le parc naturel est un espace terrestre et/ou marin, renfermant un patrimoine naturel et des écosystèmes représentant un intérêt particulier qu’il convient de protéger et de valoriser, tout en assurant le maintien de ses fonctions écologiques et l’utilisation durable de leurs ressources naturelles.

Article 6 : La réserve biologique est un espace terrestre et/ou marin situé exclusivement sur un domaine de l’Etat, renfermant des milieux naturels rares ou fragiles, d’intérêts biologiques et écologiques ayant pour vocation la conservation des espèces végétales ou animales de leur habitat à des fins scientifiques et éducatives.

Article 7 : La réserve naturelle est un espace naturel, terrestre et/ ou marin, constitué à des fins de conservation et de maintien du bon état de la faune sédentaire ou migratrice, de la flore, du sol, des eaux, des fossiles et des formations géologiques et géomorphologiques présentant un intérêt particulier qu’il convient de préserver ou de réhabiliter. Elle est utilisée à des fins de recherche scientifique et d’éducation environnementale uniquement.

Article 8 : Le site naturel est un espace contenant un ou plusieurs éléments naturels ou particuliers, d’importance exceptionnelle ou unique, méritant d’être protégés du fait de leur rareté, de leur représentativité, de leurs qualités esthétiques ou de leur importance paysagère, historique, scientifique, ou légendaire, dont la conservation ou la préservation revêt un intérêt général.

CHAPITRE 2 : OBJET

Article 9 : La présente loi distingue les Aires Protégées selon le régime foncier applicable :- Les Aires Protégées publiques situées sur le domaine public et privé de l’Etat et des Collectivités Territoriales Décentralisées.
Elles concernent exclusivement les Réserves Naturelles Intégrales, les Parcs Nationaux et les Réserves Spéciales ;

– Les Aires Protégées mixtes, combinaison de propriété publique et de propriété privée. Elles concernent le Monument Naturel Protégé, le Paysage Harmonieux Protégé et la Réserve des Ressources Naturelles ;

– Les Aires Protégées agréées instituées sur une ou des propriétés privées.

Article 10 : Les objectifs du Système des Aires Protégées consistent à :

– conserver l’ensemble de la biodiversité nationale, en particulier les écosystèmes, les espèces et la variabilité génétique ;

– mettre en valeur le patrimoine naturel, l’éducation et l’épanouissement des citoyens et des visiteurs ;

– mettre en valeur la biodiversité par la recherche ;

– maintenir les services écologiques et l’utilisation durable des ressources naturelles pour la réduction de la pauvreté ;

– promouvoir l’écotourisme ;

– distribuer équitablement les bénéfices générés par les ressources naturelles et ;

– contribuer au développement économique et social pour la génération future par la conservation et l’utilisation des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables.

TITRE II- DE LA CREATION, DE LA MODIFICATION ET DES EFFETS DES AIRES PROTEGEES

CHAPITRE 1 : PROCEDURE DE CREATION

Article 11 : La création d’une Aire Protégée relève de la compétence du Ministère de l’Environnement sur proposition de toute personne physique, ou morale et tout groupement constitué.
Il est soumis à l’avis des administrations et des collectivités locales concernées.
La ou les administrations et collectivités locales concernées peuvent formuler des avis et propositions sur ledit projet dans le délai de six mois à compter de la date à laquelle elles ont été saisies.
A défaut de faire connaître leurs avis dans ce délai, lesdites administrations et collectivités locales sont censées ne pas avoir d’objections à ce sujet.

Article 12 : Les Aires Protégées publiques, gérées par l’Etat et/ou par les Collectivités locales sont délimitées selon les règles et procédures régissant le domaine privé de l’Etat, des collectivités décentralisées et des personnes morales de droit public, selon leur statut.
Les limites ainsi établies sont matérialisées et repérées selon les formes prescrites par la loi.
Des parties du territoire terrestre ou marin, relevant du domaine public ou privé des collectivités décentralisées et des personnes morales de droit public, peuvent être classées en Aire Protégée lorsque leurs composantes telles que la faune, la flore, le sol, les eaux, et en général le milieu naturel, présentent une sensibilité du point de vue biologique ou une qualité particulière représentative de la biodiversité ou de l’écosystème national.

Article 13 : Le projet de création d’une aire protégée donne lieu à une enquête publique de trois mois ou une expertise menée par l’autorité demanderesse qui se déroule concomitamment à l’examen dudit projet par la ou les administrations et collectivités locales concernées. Cette enquête ou cette étude a pour objet de permettre au public, y compris la population locale, de prendre connaissance du projet de création de l’aire protégée et de formuler d’éventuels avis et observations qui sont consignés sur un registre ouvert par l’administration à cet effet.

Article 14 : Le Ministère de l’Environnement étudie, au plus tard dans six mois après la fin de l’enquête publique précitée, les observations et propositions formulées au cours de l’enquête.
Lorsque la création de l’aire protégée est confirmée au terme de la procédure précitée, le Ministère de l’Environnement établit les tracés définitifs de ladite aire protégée et engage la procédure d’édition du décret de sa création.

Article 15 : L’acte ordonnant l’enquête publique et déterminant la zone géographique à laquelle elle est applicable est édicté par l’administration, agissant de sa propre initiative ou à la demande des collectivités locales concernées.
L’acte ordonnant l’enquête publique fixe notamment la date d’ouverture de l’enquête, sa durée et les modalités de son déroulement.

Article 16 : Un espace présentant des caractéristiques décrites à l’article 6 et situé sur une propriété privée peut être agréé en tant qu’Aire Protégée à la requête du propriétaire. Les modalités d’agrément relatives à l’Aire Protégée privée sont fixées par voie réglementaire par le ministère de l’Environnement.

CHAPITRE 2 : DES MODIFICATIONS DES AIRES PROTEGEES
Article 17 : L’Aire Protégée peut faire l’objet d’un surclassement ou d’un déclassement, selon des critères bien déterminés.

Article 18 : Le surclassement est un changement de statut faisant accroître l’importance des mesures de conservation affectant tout ou partie d’une Aire Protégée.

Article 19 : Le déclassement est un changement de statut faisant diminuer l’importance des mesures de conservation affectant tout ou partie d’une Aire Protégée.

Article 20 : La nécessité de changement de statut peut provenir du Ministère de l’Environnement.

Article 21 : Les modalités du changement de statut sont fixées par voie réglementaire sur proposition du ministère de l’Environnement.

Article 22 : La décision de changement de statut se fait par voie de décret pris en Conseil des ministres.

Article 23 : En cas de changement de limites, celles-ci sont matérialisées par le gestionnaire de l’Aire Protégée conjointement avec les institutions concernées.

CHAPITRE 3 : DES EFFETS

Article 24 : Les droits réels de propriété des terrains compris dans les aires protégées doivent être exercés sans que l’état et l’aspect extérieur de ces terrains, tels qu’ils existaient au moment de la création de l’aire protégée, puissent être modifiés.
L’Etat peut acquérir, à l’amiable ou par voie d’expropriation, les terrains situés dans les aires protégées qu’il juge nécessaire d’incorporer au domaine de l’Etat conformément à la législation en vigueur.

Article 25 : Les droits des particuliers qui n’auront pas fait l’objet d’acquisition au profit de l’aire protégée continuent de s’exercer dans les limites des restrictions qui leur sont apportées par les dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application.
Lorsqu’il résulte de ces restrictions une dévalorisation de l’immeuble dans une proportion minimum de 15% ou une perte de revenus, les ayants droit peuvent requérir une indemnisation équivalente, la cession de l’immeuble à l’Etat ou l’expropriation pour cause d’utilité publique.
La requête doit être présentée par l’ensemble des co-titulaires des droits ou leurs suppléants, lorsqu’il s’agit d’un immeuble ou de droits constitués en indivision. L’indemnisation convenue met fin à toute autre revendication afférente au même immeuble.

Article 26 : Sous réserve des droits d’usage reconnus expressément par la législation en vigueur aux populations concernées, les activités menées dans une aire protégée, notamment agricoles, pastorales et forestières, sont réglementées compte tenu des impératifs de conservation du naturel de l’aire protégée et conformément aux mesures de protection édictées par le plan d’aménagement et de gestion prévu à l’article 39 ci-dessous.
Les droits d’usage sont entendus dans la présente loi comme étant tous prélèvements à but non commercial pour les besoins domestiques, vitaux et/ou coutumiers, réservés à la population locale.
Ils sont incessibles et s’exercent dans le cadre d’une convention conclue entre l’administration et les populations locales concernées ou leurs représentants et qui prévoit, notamment, l’objet et la consistance desdits droits, les populations qui en bénéficieront, les zones dans lesquelles ces droits s’exerceront et les conditions et les modalités de leur exercice.

Article 27 : Sous réserve des dispositions de l’article 17 ci-dessus, sont interdites ou font l’objet de restrictions, dans toute l’étendue de l’aire protégée, sauf autorisation préalable de l’administration compétente, toutes actions susceptibles de nuire au milieu naturel, à la conservation de la faune et de la flore, ou d’altérer le caractère et les éléments de l’écosystème de l’aire protégée, dont notamment :

* la chasse et la pêche, l’abattage ou la capture de la faune, la destruction ou la collection de la flore ;

* l’introduction d’espèces animales ou végétales, exotiques ou locales, sauvages ou domestiquées ;

* L’extraction des matériaux concessibles ou non ;

* toute fouille ou prospection, tout sondage, terrassement ou construction ;
* l’utilisation des eaux ;* les travaux susceptibles de modifier l’aspect de l’espace, du paysage, de la faune ou de la flore.

Article 28 : Sous réserve du respect des prescriptions exigées pour des raisons de défense nationale et de sûreté publique, la circulation, le camping et le survol à une altitude inférieure à 1000 mètres ne peuvent se faire dans ou au-dessus de l’aire protégée qu’avec la permission de l’administration compétente et dans le cadre des activités de gestion, de recherche scientifique ou de formation autorisées.

TITRE III- DE LA GESTION DES AIRES PROTEGEES

CHAPITRE 1- CADRE INSTITUTIONNEL

Article 29 : Le Ministère de l’Environnement assure, en tant que Ministère de tutelle, la coordination de la contribution des autres Ministères et des autorités locales concernées par les étapes touchant des domaines d’activités relevant de leur responsabilité respective.

Article 30 : La gestion de l’aire protégée est assurée par l’administration compétente, en collaboration avec les collectivités locales.
Les fonctions de gestion recouvrent notamment :

– la préparation du projet de plan d’aménagement et de gestion de l’aire protégée et de sa révision ;

– l’aménagement de l’aire protégée selon les prescriptions du plan visé à l’article 39 ci-dessous, la mise en place d’infrastructures adéquates et la mise en œuvre et le suivi des programmes de gestion ;

– la conclusion de conventions pour l’exercice des droits d’usage reconnus aux populations locales concernées ou des conventions pour la mise en œuvre et le suivi des programmes de gestion ;

– l’exercice de la surveillance et du contrôle de l’aire protégée tendant à prévenir, à contrôler et à interdire certaines activités humaines de nature à perturber le milieu naturel.

Article 31 : Le Ministère de l’Environnement, après consultation avec des différents départements ministériels techniques concernés, des différentes collectivités locales ainsi que des communautés locales, peut déléguer la gestion d’une ou plusieurs Aires Protégées à des personnes morales de droit public ou privées sous le régime de la gestion déléguée, conformément aux dispositions de la présente loi et des textes d’application.
Le contrat de délégation de gestion comporte en annexe un cahier des charges précisant les termes de la délégation, les droits et obligations des parties dont la consistance est déterminée par voie réglementaire.
La gestion des réseaux des Aires Protégées peut être déléguée par décret à des entités évaluées compétentes par le Ministère de l’ Environnement.

Article 32 : Le cahier des charges visé ci-dessus prévoit, notamment :

– l’objet et la consistance de la gestion déléguée, ainsi que la délimitation de l’espace qu’elle concerne ;

– les règles et conditions de gestion et d’utilisation des infrastructures et des biens dont la gestion est déléguée, ainsi que les conditions et les modalités de leur entretien et adaptation ;

– les redevances de la gestion déléguée, leur mode de calcul et les modalités de leur paiement ;

– les charges et obligations particulières qui incombent à l’administration et au délégataire ;

– les modalités de rémunération des services rendus par le délégataire ;

– le rappel du principe du respect de l’égalité de traitement des usagers, le cas échéant ;

– la ou les polices d’assurance que le délégataire doit contracter pour couvrir sa responsabilité pour les dommages causés aux tiers ;

– les garanties financières exigées du délégataire et celles exigées par la partie délégante ;

– les mesures coercitives encourues par le délégataire en cas de l’inobservation des clauses du cahier des charges ;

-la situation du personnel de l’aire protégée ;

– les droits que se réserve l’Administration de l’aire protégée.

Article 33 : Les missions essentielles du gestionnaire comportent notamment :

– la conservation et l’administration de manière durable de la diversité biologique et du patrimoine naturel ;

– la mise en œuvre du pian d’aménagement et de gestion de l’Aire Protégée et la préparation de sa révision ;

-l’aménagement de l’Aire Protégée selon les prescriptions du plan et la mise en place d’infrastructures adéquates ainsi que la mise en œuvre et le suivi des programmes de gestion ;

– la conclusion de conventions de gestion communautaires ;

– la conclusion de diverses conventions pour la mise en oeuvre et le suivi des programmes de gestion ;

– l’exercice de la surveillance et du contrôle de l’Aire Protégée visant à éduquer, prévenir, et sanctionner certaines activités qui ne sont pas conformes aux objectifs de l’Aire Protégée ;

– la pérennisation financière pour la gestion durable de l’Aire Protégée en collaboration avec le Ministère de l’Environnement.

Article 34 : Les orientations principales de gestion et la coordination générale du Système des Aires Protégées National relèvent du Ministère de l’Environnement assisté par un comité ad’hoc dont la composition et les missions sont déterminées par voie réglementaire.

Article 35 : La coordination générale porte notamment sur les questions suivantes :

– la procédure de création et de gestion d’une Aire Protégée ;

– la revue des Plans d’Aménagement et de Gestion ;

– l’octroi et le retrait d’agrément des Aires Protégées privées ;

– la coordination et facilitation de toutes les activités ou opérations relatives aux Aires Protégées ;- le contrôle et l’appui technique à la gestion.

CHAPITRE 2 : DE L’AMENAGEMENT DES AIRES PROTEGEES

Article 36 : Le plan d’aménagement et de gestion consiste en un document descriptif et détaillé indiquant les éléments constitutifs physiques et biologiques de l’Aire Protégée, son environnement socio-économique, les objectifs de gestion immédiats et à terme, la stratégie et les programmes d’aménagement et de gestion, ainsi que les indicateurs d’impact et l’estimation des besoins financiers sur une base quinquennale. Il fixe également les mesures spécifiques et les restrictions propres à assurer la conservation de l’Aire Protégée.
Le Plan d’aménagement et de gestion des Aires Protégées publiques ainsi que tout outil stratégique de gestion doivent être approuvés par le Ministère de l’Environnement et ce, du schéma directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de Djibouti et tout document national utile à ce plan.
Les opérations relatives aux Aires Protégées au niveau régional et local ainsi que les objectifs de leur gestion sont à intégrer dans un référentiel de développement territorial.

Article 37 : L’aire protégée est dotée d’un plan d’aménagement et de gestion, dont le projet est établi à l’initiative de l’administration compétente, en concertation avec les collectivités locales et les populations concernées et ce, dans le respect des documents précités dans l’article 36.

Article 38 : La durée de validité du plan d’aménagement et de gestion de l’aire protégée, qui ne doit pas excéder dix ans, ainsi que la forme et les modalités de son approbation et de sa révision sont fixées par voie réglementaire.

Article 39 : Préalablement à son approbation par l’administration compétente, le projet de plan d’aménagement et de gestion de l’aire protégée est soumis à l’avis du comité ad’hoc, des collectivités locales, des administrations concernées et des associations de la société civile ayant exprimé leur volonté.
Lesdites collectivités locales, associations et administrations peuvent formuler, dans un délai maximum de trois mois à compter de la date à laquelle elles ont été saisies, des avis ou des propositions qui sont étudié(e)s par l’administration compétente.
A défaut d’émettre leurs avis dans ce délai, lesdites collectivités locales, associations et administrations sont censées ne pas avoir d’objections à ce sujet.

Article 40 : Les limites de Zonage du plan d’aménagement est définit par voie réglementaire.

Article 41 : Les collectivités locales et les administrations publiques concernées prennent, en concertation avec l’administration compétente, toutes les mesures nécessaires relevant de leur compétence pour la mise en oeuvre et le respect des dispositions du plan d’aménagement et de gestion de l’aire protégée concernée.

TITRE IV : DISPOSITIONS PENALES

CHAPITRE 1 : INFRACTIONS

Article 42 : Sans préjudice des infractions prévues notamment par la législation forestière, cynégétique, minière, halieutique et en matière de pêche, des ressources biologiques, de faune et de flore, constituent des infractions lorsque commises sur des sites dûment reconnus comme Aires Protégées :
a) Tout défrichement suivi d’incinération sans autorisation du Ministère de l’Environnement après avis conforme du gestionnaire ;
b) Tout défrichement sans incinération sans autorisation du Ministère de l’Environnement après avis conforme du gestionnaire ;
c) Tout feu intentionnellement allumé, provoqué ou par communication ;
d) Tout prélèvement ou toute altération d’animaux, de végétaux, de monuments ou de tout autre objet sans autorisation Ministère chargé de l’Environnement après conforme avis du gestionnaire ;
e) Tout vol et recel de vol d’animaux, de végétaux, autres produits ou objets du site ;
f) Tout acte portant atteinte à l’intégrité physique de végétaux ou d’animaux;
g) Tous sévices commis sur les animaux ;
h) Toute construction sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère de l’Environnement ;
i) Toute extraction des produits des carrières et leurs dérivés ainsi que tout produit forestier non ligneux sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère de l’Environnement ;
j) Tout abattage des produits forestiers ligneux sans autorisation du Ministère de l’Environnement après avis du gestionnaire;
k) Tout abandon, dépôt, rejet, déversement, immersion de produits de toute nature susceptible de nuire à la qualité et à l’intégrité des composantes de l’environnement ;
l) Toute destruction ou détérioration d’infrastructures sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère de l’Environnement ;
m) Toute destruction ou détérioration d’infrastructures sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère de l’Environnement,
n) Toute activité de pêche ou de chasse sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère chargé de l’Environnement,

o) Toute plongée sous-marine sans autorisation régulière du gestionnaire et toute chasse sous-marine sans avis conforme du gestionnaire et du Ministère de l’Environnement ;
p) Toute occupation illicite ;
q) Toute recherche scientifique non autorisée par le Ministère de l’Environnement ;
r) Toute espèce de faune et de flore irrégulièrement détenue, transportée ou mise en vente surprise en dehors d’une Aire Protégée est présumée avoir été prélevée à l’intérieur de celle ci. Il en est de même des substances minérales, des substances de carrière et des fossiles ;
s) Toute prise de vues ou tout tournage de film sans autorisation du Ministère de l’Environnement après avis conforme du gestionnaire;
t) Toute violation des prescriptions édictées par les textes réglementaires, les règlements intérieurs, les plans d’aménagement et de gestion, et les cahiers des charges pris en application de ceux-ci.

CHAPITRE 2 : DES PEINES

Article 43 : Quiconque refuse d’obtempérer aux ordres des agents visés à l’article 51, ci-dessous ou les empêche, de quelque manière que ce soit, d’exercer leurs fonctions est puni d’une amende de 200.000 FDJ à 350.000 FDJ.

Article 44 : Est puni d’une amende de 250.000 fdj à 600.000fdj, sauf droits expressément reconnus aux populations concernées, quiconque :

– circule dans les zones dont l’accès est interdit au public ;

– abandonne objets ou détritus, solides ou liquides à l’intérieur d’une aire protégée ;

– contrevient aux interdictions de cueillette ou de ramassage ;

– laisse vaquer des animaux domestiques en dehors des lieux autorisés.

Article 45 : Est puni d’une amende de 600.000 fdj à 1.000.000 fdj et d’un emprisonnement de un mois à trois mois ou de l’une de ces deux peines seulement, sauf droits expressément reconnus aux populations locales, quiconque :

– procède à des cultures ou à des plantations dans les lieux où ces activités ne sont pas autorisées ;

– procède à des cultures ou à des plantations dans les zones où elles sont soumises à des restrictions ou à des réglementations spéciales, sans respecter lesdites restrictions ou réglementations ;

– entreprend des constructions, fouilles ou travaux de quelque nature que ce soit dans les zones où ces activités sont interdites.

Article 46 : Sans préjudice des peines plus sévères, est puni d’une amende de 350.000 fdj à 650.000 fdj, sauf droits expressément reconnus aux populations locales, quiconque :

– introduit une espèce animale ou végétale dont la présence est interdite ou réglementée, en violation des prescriptions de la présente loi ;

– occasionne volontairement un dommage à la flore, à la faune y compris la chasse, la capture des espèces sauvages et l’abattage des arbres de l’aire protégée ou aux éléments naturels de son écosystème.

Article 47 : Quiconque aura commis, à l’intérieur du noyau dur de l’Aire Protégée, les infractions prévues aux paragraphes e, f, g, i et suivants de l’article 4, sera puni d’un emprisonnement de 3 à 5 ans et d’une amende de 1.000.000 fdj à 2.000.000 fdj sans préjudice de l’application des peines plus graves prévues par des lois spécifiques.

Article 48 : Indépendamment des sanctions prévues par les articles ci-dessus, la décision de condamnation peut prévoir la remise en état des lieux aux frais du condamné.
En cas de condamnation pour infraction aux dispositions de la présente loi, le jugement peut ordonner le versement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé.

Article 49 : Les co-auteurs, les complices et les receleurs sont punis des mêmes peines que les auteurs principaux et condamnés solidairement aux frais et dommages intérêts.

CHAPITRE 3 : CONSTATIONS DES INFRACTIONS

Article 50 : Sont chargés de constater les infractions aux dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application, outre les officiers de police judiciaire, les agents de l’administration du ministère de l’environnement habilités spécialement à cet effet.
Ils doivent être assermentés et porteurs d’une carte professionnelle délivrée par l’administration selon les modalités fixées par voie réglementaire.

Article 51 : Les fonctionnaires visés au présent article susmentionné sont astreints au secret professionnel sous peine des sanctions prévues par le Code pénal.
A l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, ces agents dressent des procès-verbaux qui énoncent la nature, la date et le lieu des constatations ou des contrôles effectués. Ils sont signés par le(s) agent(s) et par la ou les personne(s) concernée(s) par les infractions.

Article 52 : En cas de refus de celle(s)-ci de signer, mention en est faite au procès- verbal. Un double est laissé aux parties intéressées.
Les procès-verbaux sont rédigés sur-le-champ et sont dispensés des formalités et droits de timbres et d’enregistrement.
Dans le cas où le contrevenant n’a pu être identifié, les procès verbaux sont dressés contre inconnu.
Ces procès-verbaux font foi jusqu’à preuve du contraire et sont mis à la disposition de l’administration.
Celle-ci peut, selon le cas, mettre en demeure, par écrit, le (s) contrevenant(s) de se conformer aux dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application.
Pour la constatation des infractions à la présente loi, les agents visés à l’article 36 ci- dessus peuvent demander le concours de la force publique.
Ils peuvent recourir à tout moyen approprié d’enquête, notamment le prélèvement d’échantillons contre récépissé.
Ceux-ci sont placés sous scellés et un exemplaire du procès verbal de leur dépôt est remis au contrevenant. Mentions en sont portées sur le procès-verbal.
Les échantillons prélevés sont acheminés à un laboratoire agréé en vue de leur examen. Les résultats de cette analyse sont consignés dans un rapport qui est joint au procès-verbal de constatation de l’infraction.
Lorsque les comptes rendus des procès-verbaux prévoient la poursuite des contrevenants, ces procès-verbaux sont communiqués dans un délai de 15 jours, courant à compter de la date de leur établissement, au procureur de la République près la juridiction compétente.

Article 53 : En cas d’infraction flagrante, les agents visés à l’article 51 ci-dessus sont habilités à faire cesser l’activité délictueuse en cours et à ordonner au (x) contrevenant(s) de quitter les lieux de l’infraction immédiatement.
Ils peuvent saisir les objets, instruments ou véhicules utilisés pour commettre l’infraction ou ayant un lien quelconque avec elle contre récépissé indiquant le nom, la qualité et la signature de l’agent qui a effectué la saisie et mentionnant ce qui a été saisi.
Ils peuvent conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche les individus qui ont participé à sa commission, conformément aux dispositions du code de procédure pénale.

Article 54 : Pour la constatation des infractions à la présente loi, les agents visés peuvent demander le concours de la force publique.
Ils peuvent recourir à tout moyen approprié d’enquête, notamment le prélèvement d’échantillons contre récépissé.
Ceux-ci sont placés sous scellés et un exemplaire du procès verbal de leur dépôt est remis au contrevenant. Mentions en sont portées sur le procès-verbal.
Les échantillons prélevés sont acheminés à un laboratoire agréé en vue de leur examen. Les résultats de cette analyse sont consignés dans un rapport qui est joint au procès-verbal de constatation de l’infraction.

TITRE V : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Article 55 : Les textes législatifs ou réglementaires relatifs à chaque type d’écosystèmes ou secteur d’activités relevant des Aires Protégées demeurent applicables dans leurs dispositions non contraires à la présente loi et en cas de silence de celle-ci.

Article 56 : Des textes réglementaires sont pris en application des dispositions de la présente loi.

Article 57 : Les Aires protégées existantes à la date de publication de la présente loi au journal officiel seront classées dans l’une des catégories prévues par les dispositions de la présente loi, selon les modalités fixées par voie réglementaire.

Article 58sss : Toutes dispositions antérieures contraires à celles de la présente loi sont et demeurent abrogées, notamment la loi n°45/ AN/ 04 L de 2004

Article 59 : Cette présente loi est enregistrée et publiée dans le journal officiel dès sa promulgation.

Fait à Djibouti, le 17 avril 2025

Le Président de la République,
Chef du Gouvernement
ISMAÏL OMAR GUELLEH